Comme la semaine dernière, nous étions présent-es au rendez-vous de Saint-Lazare, dès 10h, à l’appel de nombreuses organisations de gauche.
10h : rassemblement sur la parvis de la gare Saint Lazare
La présence policière est toujours aussi forte que le samedi précédent. Malgré les stratégies de la préfecture de police pour décourager les manifestant-e-s, en entravant leurs déplacements et en faisant planer la menace de la répression, plusieurs centaines de manifestant-e-s sont encore au rendez-vous ce matin. Moins de monde que la semaine précédente, mais une détermination intacte. Parmi les organisations présentes on compte notamment le Comité Justice pour Adama, SUD Poste 92, le Front Social, la Fanfare Invisible, le NPA, et un groupe ayant répondu à l’appel des Femmes gilets jaunes et gilets violets, que nous avons participer à lancer. Nous rencontrons et discutons avec les créatrices de la page Facebook Femmes gilets jaunes, avec qui nous échangeons depuis quelques temps sur internet.
11h : départ avorté du cortège
Le cortège démarre vers 11h sur la rue Saint-Lazare, pour être immédiatement bloqué de tous les côtés par les CRS avant même d’avoir dépassé le parvis de la gare. Les accès de la station de métro sont fermés. On piétine sur place dans le froid pendant une heure, mais la police ne passe pas à l’offensive et tout se déroule dans le calme, au son de la fanfare qui réchauffe un peu l’ambiance. Comme la situation n’évolue pas, la nasse se vide progressivement et une partie des manifestant-e-s rejoint à pied d’autres points de rassemblement dans Paris. Une partie des camarades doivent rentrer chez elles/eux, d’autres quittent la nasse pour aller manger avant de rejoindre un autre cortège l’après-midi.
14h : deuxième rassemblement de la journée à République
Rejointes par une autre camarade, on se rend à 14h Place de la République où un appel à rassemblement et cortège inter-luttes avait été lancé par plusieurs organisations et partis de gauche.
Sur place, après quelques échanges pour nous coordonner, nous retrouvons les personnes qui étaient le matin au petit déjeuner féministe organisé à Saint Denis par l’AG féministe appelé la semaine précédente par Femmes en Lutte 93. Nous sommes en tout une trentaine, dont des personnes qui sont venues avec l’appel Facebook Femmes Gilets Jaunes du matin, des militantes de Mères Solidaires, de Femmes en lutte 93 et de Féministes pour la Justice Sociale. On discute, on échange sur les manifs du matin.
15h : Formation d’un cortège féministe
D’un seul coup, une manif semble sur le cortège sur le Boulevard Bonne Nouvelle, nous formons un cortège petit mais bruyant, avec beaucoup d’énergie et d’enthousiasme. On se relaie au méga avec tou·te·s les présent·e·s, et on chante des slogans qui recouvrent la diversité militante de nos collectifs.
Les slogans se succèdent, contre les violences, la précarité et le mal-logement: “Benalla y a droit, nous aussi on veut un toit !”, “Femmes précaires, femmes en guerre, femmes de courage, on a la rage !”, “Violences sexistes, précarité, qui sème la misère récolte la colère !”, “Mères en colère, mères solidaires !”, et des chansons sur Macron, la répression, le gouvernement.
On se dirige vers Opéra, jusqu’à un barrage policier au niveau de Strasbourg Saint-Denis qui nous oblige à tourner sur la rue d’Aboukir. Le cortège est coupé en deux, nous essayons de rester groupées. On continue de scander des slogans féministes “Nous sommes fortes, nous sommes fières, et féministes et radicales et en colère !”, contre la répartition inégale des richesses “Macron y’a plus de thunes, rend l’impôt sur la fortune”, et d’autres slogans anticapitalistes déjà entendus et largement repris dans le cortège la semaine dernière.
16h30 : dispersion
Après plusieurs détours au fil des barrages de CRS et autant de divisions du cortège, on arrive sur la rue de Rivoli au niveau du Jardin des Tuileries. Le cortège est alors bloqué de plusieurs côtés par la police montée, et un camion à eau côté Concorde. Une partie des manifestant-es se dirigent vers le Sud et traverse la Seine par le Pont Royal. Fatiguées après cette journée à marcher par un temps froid et pluvieux, et craignant une nasse, nous décidons de quitter la manifestation devenue trop morcelée et du coup dangereuse. En partant, on croise un autre cortège visé par des tirs de lacrymos du côté de Pyramides et au milieu la Fanfare Invisible continue de jouer ! Scène incroyable, où les manifestant·e·s dansent sous les lacrymos, c’est à la fois effrayant et beau. Nous croisons de multiples autres petits groupes de manifestant-e-s avec ou sans gilets jaunes criant des slogans dans les rues du 1er arrondissement.
Les manifs parisiennes ont-elles atteint leur limites ?
On entend un peu partout que l’accès aux Champs Elysées est entièrement bloqué par la police, que les trains qui arrivent à Paris depuis le matin sont systématiquement contrôlés et vidés de leurs militant-es, idem sur les autoroutes… Ils vident Paris pour aujourd’hui, manu militari, et on entendra dans les jours qui viennent dans tous les journaux télévisés que la contestation sociale s’essouffle.
Nous pensons que la participation à cette manifestation hebdomadaire est utile, pour visibiliser le mouvement, sa colère, et amplifier le rapport de force contre le gouvernement Macron. Néanmoins, elle reste pour nous insuffisante. Comme nous l’expliquions en AG la semaine dernière, une intervention dans le mouvement des Gilets Jaunes doit selon nous être une intervention à toutes les échelles : à Paris et en proche banlieue, où il n’y a quasiment pas de blocages, notre responsabilité est de convaincre nos milieux (lycée, fac et travail) et nos organisations syndicales et politiques à rejoindre la mobilisation. Pour nous féministes, cela veut dire convaincre largement les féministes de se joindre à la mobilisation en y amenant leurs revendications et en cherchant à convaincre largement dans le mouvement des Gilets Jaunes de l’importance de les défendre, surtout qu’elles concernent la moitié d’entre eux/elles ! Mais cela signifie aussi d’aller sur les ronds-points et blocages pour rencontrer, discuter, élaborer et se coordonner avec les personnes qui se mobilisent en ce moment au quotidien sur les blocages. Apprendre d’eux et elles et reprendre à notre compte de nombreuses revendications que nous partageons, en particulier sur les conditions de vie et de travail et le besoin d’une société organisée démocratiquement par le bas.
Les organisations militantes organisées ne doivent pas rester en extériorité et en soutien aux Gilets Jaunes, mais y participer pleinement ! Sans rien abandonner de nos revendications, ensemble mobilisons-nous !
Pour samedi prochain, certain.es parlent déjà d’une nouvelle stratégie de blocages massifs sur des grandes villes en régions. L’occasion d’une intervention de terrain plus affirmée ?