Cette journée internationale de lutte pour les droits des femmes et minorités de genre s’inscrit dans un contexte de crise sanitaire, écologique, économique, sociale et politique.
Depuis deux ans, nous assistons à une gestion irresponsable de la pandémie qui a entraîné la mort de plusieurs centaines de milliers de personnes. Cette crise ne fait que mettre en lumière la destruction déjà entamée des services publics, notamment de l’hôpital et du système national de solidarité, alors que les destructions environnementales ne rendront que plus fréquentes les crises sanitaires et humanitaires. Ces morts n’étaient pas inévitables, mais relèvent de choix politiques délibérés qui précarisent, vulnérabilisent et sacrifient toujours les mêmes personnes : les plus pauvres, les personnes racisées et les personnes handicapées en premier lieu. Les personnes migrantes sont réprimées, la France ne respecte pas leurs droits fondamentaux, elles sont traquées, poussées à la clandestinité, lieu de tous les asservissements contre hébergements ou maigres ressources. Le refus du gouvernement de lever les brevets, sa remise en question de la gratuité des soins d’urgence, tout cela a un prix : nous le payons de nos vies. Dans ce système capitaliste, les intérêts privés sont toujours protégés au mépris de l’intérêt général et les crises successives ne font qu’enrichir les plus riches et appauvrir les plus pauvres.
D’autre part, au cours des dernières décennies, nous avons vu s’amplifier et se banaliser les discours racistes, islamophobes, LGBTQIphobes, misogynes, eugénistes, grossophobes, sérophobes, putophobes et validistes qui corrompent et monopolisent le débat public. L’antisémitisme et l’asiaphobie se sont encore renforcés pendant la pandémie avec l’essor des idées complotistes. La destruction méthodique des droits et des acquis sociaux est indissociable de l’accentuation des violences et des discours de haine. Les luttes féministes sont instrumentalisées, aussi bien par les extrêmes droites que par le gouvernement, à des fins racistes et islamophobes. Bien que représentant une importante avancée pour les femmes concernées, les personnes trans ne sont incluses dans la PMA pour toutes qu’à condition de garder leur identité civile de naissance et sans pouvoir utiliser leurs propres gamètes. Cela contraint beaucoup d’entre elles à fonder leur famille dans le vide juridique.
Tout cela renforce les inégalités sociales, les discriminations et les violences envers les minorités. Depuis deux ans, les signalements de violences conjugales ont explosé : les appels au 3919 ont triplé en avril 2020 par rapport aux mois précédents. Les attaques islamophobes se multiplient, comme les propositions de loi qui visent à exclure les femmes qui portent le foulard des compétitions sportives, des sorties scolaires. L’activation de critères de triage eugénistes pendant la pandémie et la transversalité des discours pour justifier la ségrégation sociale des enfants handicapés ont révélé le validisme profond de notre société.
De plus, ce sont ces mêmes personnes précarisées (femmes et minorités de genre, en particulier racisé.es) qui occupent les métiers de première nécessité. Pendant le premier confinement, le gouvernement et les médias ont mis en avant ces premières de corvée, vite oubliées, qui se retrouvent encore et toujours à supporter les conséquences de choix politiques mortifères.
Cette relégation aux secteurs les plus précaires de la société empêche de fuir les situations de violence au travail. De la même façon, dans le foyer hétérosexuel, la dépendance économique structurelle des femmes aux hommes rend d’autant plus difficile d’échapper aux violences conjugales et intrafamiliales. En renforçant notre isolement, ce système d’emprise met nos vies en danger. De plus, la destruction des services publics alourdit les charges (domestiques, mentales et émotionnelles) qui pèsent déjà sur les femmes et minorités de genre et nous renvoient à la place à laquelle on voudrait nous assigner : le foyer.
Malgré le manque de considération à notre égard, nous faisons tourner le monde ! C’est nous qui élevons les enfants à l’école et à la maison, c’est nous qui nettoyons les maisons et les entreprises, c’est nous qui soignons et accompagnons, qui produisons et vendons les produits de première nécessité.
Parce que nous sommes indispensables, nous sommes puissant·es.
Pour ce 8 mars 2022, nous appelons à la grève féministe sur les lieux de travail, dans les foyers, dans les écoles et les universités ainsi qu’à arrêter toute forme de consommation. Cessons tout travail productif et domestique, rétribué et gratuit.
Pour construire des mouvements sociaux véritablement émancipateurs, refusons le dévoiement de nos luttes par les extrêmes droites et plaçons ce 8 mars sous le signe de l’antifascisme.
Reprenons tous les espaces publics. Interpellons nos syndicats et bloquons tous ces domaines dans lesquels les violences et les oppressions se reproduisent. Inspirons-nous de la grève des sages-femmes, de la grève de l’éducation nationale, de la grève des AESH ! Inspirons-nous de la victoire des grévistes de l’hôtel Ibis Batignolles qui ont réussi à faire plier la direction du groupe Accor ! La lutte paie, la grève paie ! Mobilisons-nous le 8 mars et cessons le travail, salarié comme domestique.
Premières organisations signataires :
AG Féministe de Gironde, Act Up Paris, Actions Féministes Tours, Alerta Feminista (Paris), Alliance Citoyenne, Assemblée féministe 38 (Grenoble), Assemblée féministe de Montreuil, Association Paloma (Nantes), Bloke Mujeres y Disidencias Abya Yala (Paris), Collages Féministes Angers, Collages Féministes Bordeaux, Collages Féminicides Paris, Collages Féministes Lyon, Collages Féministes Poitiers, Collages Féministes Rouen, Collages Féministes Stain, Collages Féministes Strasbourg, Collages Féministes Toulouse, Collages de Pau, Collectif 25 novembre Dijon, Collectif Droit des femmes 61, Collectif féministe de Paris 8, Collectif Soror Poitiers, Collectif T’as pensé à?, Collective Turn Ovaires, Comité féministe de Paris 1, Du Pain et Des Roses, Fédération Parapluie Rouge, Féministes révolutionnaires Nantes, Féministes révolutionnaires Paris, FFFRAC (Mantes la Jolie), Frisse Asso (Lyon), FLIRT, Groupe d’Action Féministe (Rouen), Héro·ïnes 95, Iel8 (Paris 8), Initiative des étudiant-e-s, travailleurs et travailleuses grecques à Paris, La Frappe (Toulouse), La Grenade collectif féministe (Metz), La Sève, Les bavardes (Amiens), Les Débuteuses (Lyon), Les Dévalideuses, Les Grenades (Paris), Les Orageus.e.s (Dijon), Les Ourses à plumes, Les Pétrolettes (Rennes), Lesbiennes contre le patriarcat (Lyon), MeToo Fac, Mouvement des femmes Kurdes Toulouse, Ni Una Menos 21 (Dijon), Nous Toutes 31 (Toulouse), Nous Toutes 34 (Montpellier), Nous Toutes 35 (Rennes), Nous Toutes 38 (Grenoble), Nous Toutes 51 (Reims), Nous Toutes Paris 9/10/18, Nous Toutes Rennes 1, Nouvelles Rênes (Rennes), Planning Familial, Planning Familial 76, Pour une MEUF, Queer Auvergne, RaiZes Arrechas (Paris), RetentissantEs (Toulouse), Sans-Culottes 31 (Toulouse), STRASS, T-Time (Marseille), Toutes des femmes, Une Asso à Soi (Laval), Voix Déterres